Si vous ne pouvez pas aller au théâtre ce soir, pas de panique… Le théâtre est aussi là, tout près, juste à côté. Ouvrez les yeux, la pièce va commencer !

"La vie est une pièce de théâtre: ce qui compte, ce n'est pas qu'elle dure longtemps, mais qu'elle soit bien jouée."

Sénèque
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''Un artiste n'est pas un ouvier du divertissement qui compte ses heures, il se consume au feu de sa passion.''

Bartabas
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« Une pièce de théâtre, c’est quelqu’un. C’est une voix qui parle, c’est un esprit qui éclaire, c’est une conscience qui avertit ».

Victor Hugo, extrait de Faits et croyances
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« Le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles. »

William Shakespeare, extrait de Comme il vous plaira

jeudi 5 février 2009

"Chants d'adieu" (d'O. Hirata, par O. Hirata et L. Gutmann), critique: Savoir dire adieu par Perrine Thonon




Cette pièce demande à ce que l’on s’habitue à l’écriture délicate, presque inaudible, d’une humanité bouleversante. Car cette pièce représente tout simplement la vie, son bruit, sa complexité, son ironie, sa subtilité et sa brutalité. L’auteur, Oriza Hirata, a un sens de l’humour désarmant pour traiter ce que cette vie a de tragique. Il ne traduit les profondeurs de l’âme que par des mots banals, des phrases laissées en suspens. Les personnages, quant à eux, sont traités avec beaucoup de pitié, mais de façon inexorable.

L’écriture de l’auteur pourrait ressembler à une partition musicale, qui nous donne envie d’expérimenter d’une façon détournée. Il y a une apparence de vie, sur scène, que les personnages dégagent pour combler la froideur de la mort, apparence de vie car c’est une vie presque musicale, presque dansante pour les asiatiques.

C’est dans un séjour traditionnel japonais que tout se passe. On sait, parce que les personnages le disent à plusieurs reprises, que le corps de la morte - Marie, une Française - repose dans la pièce d’à côté, mais jamais on ne le voit. Sa famille et la famille japonaise, le temps de la pièce, rester dans le séjour. Anne, l’amie française de Marie qui vit au Japon depuis déjà quelques années, sert un peu de lien entre les deux familles, les deux cultures bien distinctes. Les deux familles ont du mal l’une avec l’autre, mais elles sont pleine de bonne volonté, et peuvent se comprendre, car elles vivent un même deuil. Mais il y a un fossé, ce décalage entre les deux cultures qui, trop souvent, se fait cruellement ressentir, mais qui, à certains moments, peut nous faire rire. Même quand intervient - et l’on ne s’y attend pas le moins du monde - l’ex-mari de Marie, le seul vrai élément de conflit dans la pièce, on peut également le prendre à la rigolade. Quoi qu’il en soit, même si le sujet de la pièce est grave, triste, important, qu’il peut nous laisser un peu d’émotion, cette pièce pourrait pratiquement être une comédie, où les différences flagrantes sont causes d’hilarité.

On aurait presque l’impression d’assister à la veillée funèbre, tant on se sent proche de la douleur - même de ceux qui tentent de la cacher - des membres des deux familles, même si il faut un temps d’adaptation pour rentrer dedans. Alors, ensuite, on peut se laisser aller par la pièce et les émotions que l’on en ressent. Après la pièce, évidemment, on n’en ressort pas indifférent, mais avec le cœur un peu serrée d’une douleur qui pourrait bien nous arriver, car tout le monde peut perdre, tout d’un coup, une fille, une sœur, une femme, une amie…

Et puis il y a cette incompréhension, parfois, des Japonais. Ils parlent entre eux, on se sent un peu à part, tout comme la famille française de Marie. On se sent exclu, surtout lorsque, parfois, personne ne prend la peine de traduire. C’est alors dans ces moments-là que l’on se rend bien compte que c’est toute une culture, une langue différente, que l’on n’est pas chez soi, et même très loin de là. On ne comprend pas, on s’interroge, et puis on oublie notre sentiment d’exclusion dès que la conversation reprend le français.

Enfin, cette pièce, d’une extrême délicatesse à presque musicale, peut en enchanter plus d’un. Une pièce poignante, à sortir de la salle avec le cœur serrée d’une douleur peut-être partagée, ou en prévision d’une quelconque douleur future. Peu d’actions, mais beaucoup de mots, de silences éloquents. Un peu de rejet, bien vite oublié, mais un sentiment de tristesse commun, que ce soit du côté japonais ou français. En bref, un spectacle à ne pas rater.

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