Si vous ne pouvez pas aller au théâtre ce soir, pas de panique… Le théâtre est aussi là, tout près, juste à côté. Ouvrez les yeux, la pièce va commencer !

"La vie est une pièce de théâtre: ce qui compte, ce n'est pas qu'elle dure longtemps, mais qu'elle soit bien jouée."

Sénèque
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''Un artiste n'est pas un ouvier du divertissement qui compte ses heures, il se consume au feu de sa passion.''

Bartabas
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« Une pièce de théâtre, c’est quelqu’un. C’est une voix qui parle, c’est un esprit qui éclaire, c’est une conscience qui avertit ».

Victor Hugo, extrait de Faits et croyances
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« Le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles. »

William Shakespeare, extrait de Comme il vous plaira

mercredi 31 mars 2010

Un mensonge de très mauvais gout!


Un mensonge de très mauvais gout !

Dramatique, l’usine Thyssenkrup de Turin a brulé ! Horrible, également, le spectacle qu’en a tiré Pipo del Bono et qu’il a intitulé la « menzogna », le mensonge en français. En effet, cette création est plus que douteuse sur de nombreux points.

Premièrement, nous avons eu le droit à une représentation affligeante de nudité. Les danseurs s’exhibaient de façons lubriques sur scène n’apportant rien à cette création. C’est sur, nous aurions eu plus de plaisir à nous trouver à un spectacle de striptease, au moins là on sait pourquoi on y va ! Il est quand même anormal d’avoir du nu pour nu et ça sous le nom de la culture.

Deuxièmement, la qualité musicale était d’un piètre niveau. Pour agrandir ce désastre sonore, les danseurs beuglaient tels des animaux en rut.

Troisièmement, pour un spectacle de danse, nous n’avons pas beaucoup vu danser ce qui est quand même le comble pour un spectacle de danse contemporaine. Sauf, quelques artistes se trémoussant de façons équivoque et gâchant les vraies minutes d’une exécution magistrale d’un tango.

Dernier éléments négatifs, la soirée a commencée avec 45 minutes de retard, des spots éclairaient violement les spectateurs. Ceux-ci étaient en plus, éblouis par des flashs agressifs d’appareil photo, surement pour certifier que des courageux assistaient à cette mascarade. Ce spectacle comportait des thèmes tous plus confus les uns que les autres ce qui a évidemment perdu pas mal de spectateur.

Pour en conclure, y avait-il un message ? Si oui, nous le cherchons toujours… Ce qui est malheureux pour un spectacle qui aurait du être le sommet de notre compréhension après deux ans de travail en Arts d’Expressions. En un mot, cette représentation était choquante, assurément provocante mais certainement pas recommandable !

Masset Benoit 6D

"La Menzogna" Pippo Delbono - La Menzogna, (le Mensonge) démasqué ! - S. Klutz




Un fait d’actualité scandaleux est à l’origine du spectacle : en 2007, à Turin, sept ouvriers brûlent dans l’incendie qui ravage l’usine Thyssen-Krupp. Les dirigeants de cette usine trop vétuste veulent faire croire que les employés n’ont pas veillé au renouvellement des normes de sécurité et tentent d’acheter leur silence. Pippo Delbono, inspiré par la tragédie que vivent les victimes d’accidents au travail, invente alors sa propre usine de théâtre. Un lieu de morts, d’amour et de vices, plongé dans la nuit et peuplé de marginaux : prostituées, homosexuels, ouvriers qui aboient et autres « fous » qui miaulent. Le metteur en scène y enferme ses visions d’un monde en folie.

Dans la première scène, qui dit tout en quelques minutes, Pipo nous plonge dans un vestiaire sinistre où des ouvriers défilent lentement au début, de manière réaliste, avant d'être emportés, à mi-spectacle, dans une danse énergique et dénudée, sur des rythmes trépidants de Stravinsky. Entre-temps deux vidéos nous délivrent le message social de base: un curé progressiste fait la critique radicale du capitalisme financier alors qu'une pub « mensongère » (signification du titre) du groupe Thyssen-Krupp achève de nous écœurer.

On assiste à un théâtre traversé par les fantômes de Kantor, Pina Bausch, Pasolini, constitué principalement d’images, de tableaux où les corps parlent plus que les mots. Un théâtre où l’on se sent irrésistiblement libre. Libre d’être subjugué par la beauté plastique du spectacle, de se laisser entrainer par les émotions changeantes qu’il procure, de rêver sur la bande son musicale enveloppante, de penser au monde dans lequel on vit. De faire des allers-retours entre la scène et la vie. Un véritable cadeau.

Pippo Delbono est ici à la hauteur de ce qu’il dénonce, titan contre l’ordre tyrannique d’un Occident qui tétanise les esprits à force de justement les assaillir d’images. Le Mensonge s’enracine dans un réel, celui de la mort de sept ouvriers calcinés par le brasier industriel de l’usine ThyssenKrupp, que viennent éclairer la fiction, les références artistiques, les propres mensonges et les propres omissions avouées de l’auteur. « Je demande aux gens de faire des efforts pour tâcher d’être plus lucides. » dit Pippo Delbono qui, en toute conscience et en toute colère, joue de l’inquiétude, du déséquilibre, de l’inconfort et de la violence.

Bref, Delbono invente un nouveau spectacle de la révolte, en pervertissant les codes du théâtre. Après l’ouverture silencieuse et lente de la Menzogna, la mise en scène de la violence s’installe durablement. Le tissu sonore, qui mêle tango, opéra, Stravinsky, Wagner et Juliette Greco, se charge d’ailleurs de maintenir tension dramatique et émotion tout au long de la pièce. On assiste donc, à un travail fabuleux sur la voix, le geste, le rythme et l’espace de jeu. A voir !

Sophie Klutz



mercredi 3 mars 2010

"Le Dieu du carnage" Yasmina Reza - Le Dieu du carnage conjugal - S. Klutz


L'histoire tient en quelques mots. Ferdinand, onze ans, a violemment frappé au visage avec un bâton un enfant du même âge, Bruno. Plutôt que de porter l'affaire en justice, leurs parents respectifs ont préféré se rencontrer pour trouver un arrangement…

La pièce ne révolutionne pas les consciences, s’étirant sur 1h30 une idée simple et vraie se tisse : sous chacun des deux couples hypercivilisé sommeille un sauvage qui s’ignore.

« Ferdinand a cassé deux dents "armé d’un bâton" à Bruno ». On démarre sur cette phrase, pas "armé", "muni", dit le père de Ferdinand, il s’agit donc d’une réunion de conciliation des deux ménages pour tenter de trouver une solution amiable avant la valse des avocats et des assurances.

Des alliances de circonstance se font et se défont entre les deux couples. Des dissensions apparaissent au sein des couples. Entre la bienséance et l'envie d'en découdre, qui l'emportera ? Le moindre écart de langage, car c'est évidemment de cela, et rien que de cela qu'il est question, sera fatal.

Du coté des spectateurs, dans la salle, murmures et gloussements se font entendre à chaque réplique choc, à chaque trait bien rendu par la mise en scène. Mais ce n’est pas le texte où la mise en scène qui est ainsi remarqué, comme je commence à le comprendre, c’est l’action elle-même, exactement comme si elle avait lieu en vrai et que chaque spectateur se trouvait aussi dans le salon en train de participer a ce règlement de comptes. Et la preuve en est que lorsque la maman de Ferdinand, exaspéré par son mari et son addiction au téléphone mobile, balance ce dernier dans le vase plein d’eau, la moitié de la salle applaudit vigoureusement à ce geste salutaire : enfin, il ne va plus nous enquiquiner, celui-là ! Parce que ce téléphone portable était plus dérangeant que cent téléphones vibrant dans une salle de cinéma.

La pièce possède une caractéristique : elle est aérée de silences pour faire vrai comme dans la vie, on ne se connaît pas, il y a des blancs dans la conversation, sauf qu’ici, ces blancs, on les traîne du lever de rideau au salut final des acteurs, des petits silences tellement fréquents et réguliers qu’on finit par les attendre… Sans entracte, la pièce démarrant à 20h45, à 22h20, on est dans la rue. On ne s’ennuie pas, on passe un moment sans ennui, à rire, à observer les deux couples se chamailler, pleurer, picoler, plus pour deux dents et un bâton mais pour des problèmes au sein même du couple.

Yasmina Reza nous révèle l'oeuvre du dieu du carnage: celui qui maîtrise nos instincts les plus viles. La violence qui sommeille en nous est toujours prête à faire irruption, et il n'en faut pas beaucoup pour la réveiller! Ainsi, chacun perd peu à peu le contrôle, le sens des limites sociales, s'excite, s'énerve. On a l'impression de voir enfin son vrai visage, mais - changement de plan - on se retrouve projeté encore plus loin, dans une autre direction... Ce ping pong dramatique que Yasmina Reza nous propose est révélateur et réaliste : grâce à son humour décalant et à son thème familier. On ne peut qu’aimer ! Le spectateur, devient un Dieu conquis.